Présentations

See video

Conférence dans le cadre de la chaire Perelman, ULB Bruxelles, 22 mars 2021

Si ce nouveau conflit de planètes désoriente si profondément la politique d’aujourd’hui, c’est parce qu’il obscurcit à la fois l’espace et le temps qui servait de cadre à ce qui ressemblait jusque-là, malgré tout, à une direction de l’histoire plus ou moins partagée par ceux qui voulaient la ralentir comme par ceux qui voulaient l’accélérer.
Commençons par l’espace. Si Mars apparaît pour certain comme le plan B après que le plan A, la Terre de notre naissance, aura été sacrifiée, c’est parce qu’on a pris l’habitude de comparer des planètes entre elles. Or, s’il est bien vrai que Mars est une planète, ce n’est pas le cas, ou, en tous cas, ce n’est plus le cas de Terre. Comme le disait ce soir-là mon ami géochimiste sans pouvoir intriguer les journalistes de la télévision : « Mars n’a pas de zone critique ! ». En effet, la Vie n’y a pas transformé les conditions initiales au point de créer un environnement durablement favorable à la continuation de son expérience multiforme. Pour le dire d’une façon brutale, Mars est juste une planète parmi d’autre alors que Terre a, ou est une zone critique.

See video

Conférence de clôture de citéphilo (en distanciel) de BL diffusé le 28 novembre 2020

On tire quatre leçons du confinement dans cette conférence en partant de la proposition que le Covid 19 est un "instituteur" assez dur et exigeant. La première est le changement du monde social à cause de l'introduction des microbes et le paradoxe de se trouver isoler pour être solidaire. Deuxième leçon: la suspension de l'économie et le doute porté sur l'idée de nécessité de son mouvement révèle l'importance des questions anthropologiques que cachent les notions d'économie. Troisième leçon: la modification de la globalisation qui n'incluait pas les acteurs innombrables dont la pandémie a révélé la présence. Quatrième leçon: bien que chacun espère sortir du confinement, il existe un autre confinement, à l'intérieur des zones critiques, dont on ne sortira pas. Cela change la nature de la nature.

See video

Conférence spectacle Inside, créée à Nanterre Amandiers, mise en scène par Frédérique Ait-Touati 5 juin 2018, Marseille à l'occasion de Opera Mundi et du Festival littéraire Oh les beaux jours !

Depuis 2014, le philosophe Bruno Latour nourrit la programmation de Nanterre-Amandiers de ses travaux et pensées : participation à des événements comme Make it Work ou Mondes possibles, résidence de son Master en arts politiques (SPEAP), présentation de conférences performatives comme Inside créé sur le grand plateau en 2016. Inside, qui est repris cette saison, en plus de la présentation d’une toute nouvelle conférence : Moving Earths. Le tout, en collaboration étroite avec la metteuse en scène Frédérique Aït-Touati.
Inside et Moving Earths ont pour objectif commun de remettre en question nos idées reçues concernant la planète, cette Terre que nous habitons comme nous marchons dessus, presque sans y penser. Ces perceptions correspondent-elles à la réalité ? Pas exactement, si l’on en croit Bruno Latour et Frédérique Aït-Touati. Inside s’intéresse par exemple à la « zone critique », cette mince surface où l’air, le sol, le sous-sol et le monde du vivant interagissent. À travers une série de tests et de projections d’images, de cartes et de dessins, l’on va tenter ici de comprendre ce que signifie « vivre dedans » et non « sur ».

See video

Conférence du 1 février 2020 tournée par Jérémie Fontaine (éditée par Yannaï Plattener

C’est tellement simple, et pourtant chacun peine à décrire simplement de quoi il dépend, que ce soit lointain ou que ce soit proche. « Ce qui va vous aider, peut-être, c’est de placer derrière vous, à main gauche, ce qui vient menacer, détruire, abîmer ce dont vous dépendez pour subsister. Et là, de nouveau, vous pouvez choisir de placer sur le cercle le plus éloigné ce sur quoi, hélas, vous n’avez aucune prise et, dans le petit cercle, ce qui vous concerne au premier chef. Vous pouvez parfaitement raffiner : il y a en effet des menaces plus ou moins intenses, vous les placez alors à main gauche presque de profil ; et celles que vous trouvez moins intense, vous les placez plutôt derrière vous, comme si elle agissait dans votre dos, subrepticement ».

See video

Après la publication de Où atterrir? des artistes, des chercheurs en sciences sociales ou sciences naturelles, des activistes, ont souhaité rendre la démarche proposée opérationnelle et ont développé des procédures pour écrire les "nouveaux cahiers de doléance"; c'est cette démarche que BL explique en 25 minutes devant la caméra de Jérémie Fontaine.

Le projet ambitieux et délicat, c’est d’accepter de se poser ces questions périlleuses et même parfois toxiques, sans réduire aussitôt la question du territoire à l’identité ou aux frontières.
C’est justement parce que la conduite d’une telle enquête est si délicate, qu’elle ne peut reposer que sur une méthode originale exigeant l’auto-description.
Dire qu’il s’agit d’auto-description permet de bien souligner qu’Il ne s’agit en aucun cas de réaliser une étude menée par des spécialistes des conditions matérielles des citoyens. Naturellement, tout le travail d’enquête effectuée par les sciences naturelles et sociales sur ces territoires doit servir de ressources indispensables, mais seulement après coup, une fois aiguisé l’appétit de s’en nourrir. Le problème politique actuel n’est pas le manque de connaissance, mais le manque de description partagée, après cinquante ans de dépolitisation et d’individualisation qui nous a rendus incapables de définir le sol sur lequel nous résidons et donc de déceler les amis avec qui nous sommes prêts à cohabiter aussi bien que les ennemis qu’il nous faut combattre.
Dans notre expérience, le simple fait de diriger la question vers les attachements redonne une attitude politique et presque une fierté, en tous cas une assise nouvelle à ceux à qui on s’adresse ainsi. Cet effet que l’on peut qualifier parfois de thérapeutique étant donné la désespérance dans laquelle se trouvent souvent les acteurs, se distingue radicalement du recueil d’opinion ou de l’expression des valeurs auxquelles sont supposés tenir les gens interrogés. Autrement dit, sonder les citoyens sur leurs valeurs ou sur leurs opinions ne produit pas forcément grand-chose en termes de compréhension du territoire vécu et ne définit aucunement les lignes de conflits et controverses qui permettraient de retrouver des marges de manœuvre.

See video

"Politiques de la terre, une brève introduction" Leçon inaugurale rentrée du collège universitaire de Sciences Po, aout 2019

Cette attraction pour le terrestre ne se réfère plus à des communautés imaginaires – le peuple, le globe, le marché, le bel autrefois – mais à un sol concret, un sol épaissi par le grand nombre d’êtres auxquels les sciences de l’écologie et du climat ne cessent de nous rendre attentifs. Au lieu d’une version abstraite et seulement horizontale d’un sol bordé par des lignes comme sur une carte, on a plutôt à faire à un sol vertical, qui limite (et délimite) tout autrement les ambitions humaines. Avec cette rematérialisation du sol vécu, l’enjeu n’est plus, comme jadis, d’organiser la production et d’en répartir les fruits au mieux, mais de reconnaître un doute profond sur ce que veut dire « produire des biens à partir de ressources ». Ce n’est pas seulement notre modèle de production qui est mis en cause, mais la notion même de production, ainsi que ses conséquences sur la justice sociale et sur la question des appartenances à la Terre.

See video

Atelier préparatoire à l'écriture de cahiers de doléance, au théâtre des Amandiers, à Nanterre en mai 2018 avec la participation de S.O.C - la discussion pendant la rédaction des questionnaires n'est malheureusement pas audible.

Les formes actuelles de concertation se sont épuisées. Le doute s’est installé sur toutes les procédures de représentation. Beaucoup de responsables avouent qu’ils ou elles « ne savent plus comment écouter les habitants ». Quant aux citoyens ils passent du cynisme à la résignation en se plaignant de n’être plus écoutés.
Nous faisons le diagnostic que l’épuisement des capacités d’expression et d’écoute politiques provient de l’absence d’une procédure préalable qui permettrait aux habitants de discerner quel est le territoire sur lequel ils habitent. Par territoire ou « terrain de vie » nous entendons
1°) ce qui permet de subsister ;
2°) ce que l’on peut se représenter ;
3°) ce que l’on est prêt à défendre.
L’hypothèse de travail est donc très simple : si vous pouvez décrire le territoire que vous habitez, vous pouvez définir des intérêts et donc dessiner des lignes de conflits et vous mettre en quête d’alliances. Une expression politique devient à nouveau possible. La question de la représentation se pose à nouveau. On peut entendre ce que demandent les habitants et ceux-ci peuvent avoir le sentiment, à nouveau, d’être compris par leurs représentants à l’écoute de ce qu’ils demandent.
Pour nous faire comprendre nous utilisons le parallèle avec l’épisode des Cahiers de Doléance de 1789 rédigés par tous les états et communes de France en quelques mois à la demande du roi Louis XVI dépassé par les évènements et voulant éviter la ruine du royaume en situation de disette et de banqueroute. L’intérêt de ces cahiers c’est de voir comment des habitants deviennent capables :
- de décrire leurs conditions de vie dans le plus grand détail ;
- de repérer les injustices qui marquent ces conditions de vie ;
- et de formuler des doléances pour redresser ces injustices.

See video

Agora des savoirs. 23 novembre 2017. Montpellier.

Cette conférence voudrait relier trois phénomènes que les commentateurs ont déjà repérés mais dont ils ne voient pas toujours le lien — et par conséquent dont ils ne voient pas l'immense énergie politique qu'on pourrait tirer de leur rapprochement : d'abord la « dérégulation » qui va donner au mot de « globalisation » un sens de plus en plus péjoratif ; ensuite, l'explosion de plus en plus vertigineuse des inégalités ; enfin, l'entreprise systématique pour nier l'existence de la mutation climatique. L'hypothèse est qu'on ne comprend rien aux positions politiques depuis cinquante ans, si l'on ne donne pas une place centrale à la question du climat et à sa dénégation. Tout se passe en effet comme si une partie importante des classes dirigeantes était arrivée à la conclusion qu'il n'y aurait plus assez de place sur terre pour elles et pour le reste de ses habitants. C'est ce qui expliquerait l'explosion des inégalités, l'étendue des dérégulations, la critique de la mondialisation, et, surtout, le désir panique de revenir aux anciennes protections de l'État national. Pour contrer une telle politique, il va falloir atterrir quelque part. D'où l'importance de savoir comment s'orienter. Et donc dessiner quelque chose comme une carte des positions imposées par ce nouveau paysage au sein duquel se redéfinissent non seulement les affects de la vie publique mais aussi ses enjeux.

See video

Inside est une "conférence augmentée" créée par Frédérique Ait-Touati à partir d'une conférence de BL placé sous ou derrière des images d'Alexandra Arènes, Sonia Levy et Axelle Grégoire, avec Patrick Laffont-DeLojo à la régie, et jouée à la Criée de Marseille le 24 mai 2018 après sa création à Nanterre-Amandiers en 2016. Elle a été jouée en anglais à Francfort et Berlin et en français à Strasbourg. (Pour une vision plein écran de meilleure qualité aller à https://youtu.be/qqBzXZ8IZ6w)

La conférence devient un spectacle à cause des images, cartes et expérience de visualisation proposés par les auteurs. Le public est invité à comprendre ce que veut dire se trouver "dans" ou "sous" la terre et non pas "au dessus" en la saisissant comme un globe vu de l'espace. Les conséquences politiques d'une représentation alternative du terrestre sont ensuite tirées.

See video

Le 28 juin 2017 au Musée de la chasse et de la nature, en lien avec le numéro de la revue Biilebaude

Si je vous dis : « Il faut sauver la nature », vous direz sans y penser : « Oui, oui, bien sûr » — et vous passerez à autre chose de plus important.
Mais si je vous dis : « Il faut défendre votre territoire ! » alors, là, vous vous mobiliserez aussitôt — vous voilà déjà en route pour le front en disant : « Bien sûr, c’est naturel de se défendre, même les animaux, après tout, protègent leur territoire ».
Ah tiens, c’est intéressant : il vous semble naturel de protéger son territoire, mais pas de défendre la nature ?
Pourquoi cette différence de sensibilité ?
Parce que la nature, le plus souvent, c’est ce que l’on contemple de face, derrière une vitre, comme un spectacle ou comme un paysage.
Le territoire, c’est tout autre chose : c’est ce sur quoi on pose les pieds, ce dont on dépend, ce que l’on tremble de perdre, ce dont chacun sait qu’il faut prendre un soin extrême.
Il y a donc deux paysages : celui que l’on regarde en face, de façon détachée, et celui dans lequel on se trouve inséré et qui vous tient.
D’où la question suivante : est-ce que vous savez vraiment de quoi se compose le paysage dont vous devez prendre soin ? Jusqu’où s’étend-il ? Quelles sont ses limites ? Qui sont ceux qui l’occupent et qui l’animent ?
Et là, première surprise : vous vous trouvez bien embarrassés pour décrire un peu précisément le territoire à défendre.
Que faire ? Vous équiper pour traquer, capter, pister, sillonner ce dont vous ne connaissez pas les exactes limites.
D’où la deuxième surprise : la nature qui se trouvait en face de vous, voilà qu’elle se trouve désormais sous vos pieds — et qu’elle vous tient.